10 augustus, 2009

Meer naar aanleiding van soefi-anarchisme

Een tekst naar aanleiding van een boek dat iemand mij aanraadt in verband met soefi-anarchisme - een recensie uit het verdwijnputje van het internet gehaald:
ent cinquante ans après son apparition, on mesure mal la radicalité et l’ampleur d’un projet anarchiste doublement dénié dans ce qu’il peut. Du côté des dominants, par une historiographie officielle malveillante et obtuse, soucieuse, dans sa vague inquiétude, de le réduire à un folklore marginal, immature et criminel. Mais du côté des dominés également, par le triomphe passé d’un projet communiste et marxiste suffisamment lié au pouvoir des « partis » et des États (dans l’ex URSS et ailleurs) pour attirer à lui quelque temps la foule empressée des intellectuels, des apparatchiks et autres gestionnaires amoureux du pouvoir ; avant que de vieilles et nouvelles divinités - le libéralisme, la sociologie, la religion, la presse, la politique, l’expertise pontifiante et lucrative - ne leur offrent les servitudes auxquelles ils aspirent.

Placés sur le terrain de la philosophie et de l’histoire, les Trois essais de philosophie anarchiste veulent contribuer à cette réévaluation contemporaine d’un projet longtemps méprisé. Par son objet et les domaines qu’il explore (la tradition arabo-persane, la pensée d’Hannah Arendt, les révolutions européennes du XIXe siècle…), ce livre n’est pas d’une lecture facile. Mais ceux et celles qui refusent l’ordre du monde et qui agissent pour une vie radicalement différente, - quels que soient les raisons, les domaines et les méthodes de leur action -, auraient tort cependant de se détourner de ce type de textes. Toutes les luttes émancipatrices, aussi différentes et singulières qu’elles puissent être, ont besoin les unes des autres pour promouvoir ce dont chacune est porteuse, sans hiérarchie ni prééminence de l’une ou de l’autre, sur le terrain de la dispute et de la réflexion philosophiques et théoriques comme sur celui de la révolte immédiate la plus instantanée, là où chaque lutte a la possibilité de se reconnaître aussitôt dans les autres, alors même qu’elle en diffère davantage. L’action révolutionnaire, parce qu’elle embrasse la totalité de ce qui est, ne craint pas d’impliquer dans son mouvement tous les domaines de la vie, - l’amour, le travail, l’art, les mathématiques, l’histoire, la philosophie, mais aussi la réflexion la plus érudite et apparemment la plus arbitraire. Sauf à laisser aux charlatans et autres Lénines post-modernes, le soin de les enchaîner de nouveau à leurs simplifications abusives, de les soumettre à une représentation théorique d’autant plus despotique qu’elle est simpliste.

Face aux mises en ordre du temps et de la signification de toute chose, prétendant dire et contrôler la totalité de ce qui est, face à la fluidité apparente de la marchandise, l’harmonie des mises en formes sociales, des spectacles et des défilés, les raisonnements sans faille du marché et du discours public, les Trois essais de philosophie anarchiste montrent au contraire comment l’ordre social, dans son soucis totalitaire et minutieux de tout contrôler, de tout soumettre à la logique et à la dictature du profit, du pouvoir et de leurs exigences, peine, aujourd’hui comme hier, à ordonner l’infinité des possibles dont le réel est porteur, à refouler et à contenir ce qu’il n’ordonne pas, à échapper aux mille défaillances qui, dans le plus petit détail de ses mises en formes chaotiques, le traversent et l’arrêtent de brèches innombrables, le menacent sans cesse d’une infinité d’autres possibles. Face aux sirènes non moins totalitaires de projet prétendument émancipateurs, fondés sur une marche impérieuse de l’histoire, - ce « grand cortège triomphal qui passe au dessus de ceux qui jonchent le sol » dont parle Walter Benjamin, les Trois essais de philosophie anarchiste contribuent à affirmer la discontinuité, la multiplicité, la subjectivité et l’imprévisibilité absolues du devenir des êtres, là où chaque entité, - vous, moi, nous et les autres, humains et non humains -, peuvent affirmer leur singularité et leur autonomie absolues, et créer ainsi les conditions d’une véritable émancipation.

altercol

D. Colson, Trois essais de philosophie anarchiste, Islam, Histoire, Monadologie, éditions Léo Scheer, 2004.

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